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Taxation des revenus immobiliers étrangers : La Belgique est condamnée

Situation

Pour les biens immobiliers situés à l’étranger, la loi fiscale belge prévoit une taxation sur la base du loyer effectivement perçu ou de la valeur locative brute (c’est-à-dire le loyer qui aurait pu être perçu si le bien avait été loué).

Si le bien immobilier en question est situé sur le territoire d’un Etat avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de double imposition, les revenus ne seront pas taxés en Belgique mais pris en compte pour le calcul du taux d’imposition des autres revenus imposables en Belgique (principe de la «réserve de progressivité»).

Ces règles sont extrêmement défavorables en comparaison avec celles qui s’appliquent aux immeubles situés en Belgique. Dans ces cas, la base imposable se fonde généralement sur le revenu cadastral qui, bien qu’indexé et, le cas échéant, majoré de 40 %, demeure inférieur à la valeur locative de marché actuelle.

Avertissements et condamnations 

La Belgique et ses responsables politiques successifs ont été informés de cette situation.

En 2007, la Commission européenne souleva ce problème et mit la Belgique en demeure de réagir à l’incompatibilité de sa législation avec le principe européen de libre circulation des capitaux.

Le 11 septembre 2014, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné la Belgique, jugeant les règles précitées contraires à la libre circulation des capitaux.

Le 29 juin 2016, l’administration fiscale a réagi à cette décision en rédigeant une circulaire n°22/2016, acceptant que la valeur locative d’un immeuble situé à l’étranger puisse être déterminée à l’aide d’une valeur fixée ou expressément approuvée par les autorités de l’Etat de situation du bien.

Rien n’était toutefois prévu lorsque cette valeur n’existait pas dans l’Etat étranger où l’immeuble était situé ou lorsque l’immeuble était donné en location.

Le contribuable et ses conseils étaient donc laissés sans instruction, face à une discrimination avérée. Le comble, c’est que l’administration fiscale ne s’interdisait pas de rectifier la situation des contribuables, en appliquant ces règles incompatibles avec le droit européen.

La jurisprudence belge condamna ces excès. Dans un arrêt du 28 juin 2017, la Cour d’appel de Liège se fonda sur l’arrêt de la Cour de Justice pour écarter la législation belge dans une affaire concernant un immeuble loué situé au Luxembourg, fixant la base imposable à 22,5% du montant brut des loyers perçus. L’enseignement de cet arrêt fut suivi dans d’autres décisions et encore récemment dans un jugement du Tribunal de première instance de Liège du 25 juin 2020.

Les critiques se multiplient encore, puisqu’en 2018, la Belgique est à nouveau condamnée par la Cour de justice, à l’occasion d’un recours en manquement introduit par la Commission.

Négligence et conséquences

Pourtant 13 ans après la première mise en demeure, la loi n’est toujours pas adaptée, obligeant la Commission européenne à introduire un nouveau recours en manquement contre la Belgique, à l’issue duquel, l’Etat belge est condamné dans un arrêt de la Cour de justice du 12 novembre 2020.

La Belgique se savait d’ailleurs coupable : elle n’a pas contesté le bien-fondé de la sanction demandée par la Commission. Elle se contentera d’invoquer quelques circonstances atténuantes, comme les affaires courantes. Face aux arguments de la Commission, elle finira d’ailleurs par renoncer à déposer un mémoire en réplique, c’est-à-dire à répondre.

Au final, elle sera condamnée à une amende de 2.000.000 € et une astreinte de 7.500 € par jour, soit 225.000 € au jour où nous rédigeons la présente contribution.

Alors que la justice est exsangue, comme d’autres secteurs, faute de moyens financiers et que le déficit budgétaire reste le prétexte du vote de nouvelles taxes, les gouvernements successifs, par leur négligence, dilapident les fonds publics.

Espérons néanmoins que la loi soit rapidement et correctement adaptée. Le contribuable y retrouvera de la sécurité juridique et le montant de l’astreinte pourrait ne pas dépasser celui de l’amende…

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